TUERIE : L’OVNI DU RAP GAME DEVIENT « PAPILLON MONARQUE » DANS SON NOUVEL ALBUM

Vous l’avez peut-être connu à ses débuts sous le nom de Tuerie Balboa. Aujourd’hui et depuis son grand retour sur la scène rap, l’artiste du label Foufoune Palace se fait appeler Tuerie. Derrière ce patronyme se cache une écriture que Tuerie définit comme violente, poétique et très liée à l’introspection. Ses récits percutants viennent se coucher sur des compositions musicales inspirées par la bande-son de sa vie. « Ma mère m’envoie beaucoup de choses différentes. Elle m’envoie Dalida, Prince, Michael Jackson, Stevie Wonder, Luther Vandross, Jacques Brel, Claude Nougaro, Renaud, Michel Berger, Balavoine… Beaucoup de chansons françaises, mais beaucoup de trucs funky aussi, comme Gap Gang, Earth, Wind and Fire. C’est ce qui fait que je suis directement exposé à tous ces mélanges-là. »

Un éclectisme musical que Tuerie perpétue toujours actuellement en bon passionné de rock alternatif, de fusion, de rap, de RnB, de soul et de jazz. En fait, dès ses débuts, Tuerie apparaît dans le paysage du rap comme un artiste que l’on ne peut cantonner uniquement au rap. Climax après climax, il façonne à son image le rappeur atypique qu’il aspire à devenir. « Je pense que le premier, ça a été le fait d’aller à la chorale alors que mes potes allaient au foot. Je commence à chantonner là-bas, en réalité. Après, je trouve ça plus intéressant d’avoir un live band, alors je commence à traîner devant les conservatoires et jouer avec des amis qui font de la musique. Du coup, sur scène, je suis accompagné, alors que les autres ont des bandes-son. C’est arrivé très tôt. Ça m’a valu quelques galères, parce que dans la ville d’où je viens, Boulogne, à l’époque, il y avait une sonorité très « New-York ». Moi, j’étais un petit peu un OVNI dans tout ça. Les rockeurs ne voulaient pas d’un rappeur noir et les rappeurs voulaient très difficilement d’un mec qui flirte avec le rock. Ça a donc été complexe. »

Mais ce ne sont ni ces difficultés, ni ces obstacles qui l’empêcheront de croire en sa vision. C’est d’ailleurs coup sur coup la même recette que nous sert Tuerie sur son premier album, Bleu Gospel et, là, plus récemment, sur son dernier projet, Papillon Monarque. « Je travaille avec comme unité de mesure la spontanéité. J’ai juste fait ce que j’avais envie de faire. Pour un morceau comme « Garçon triste », je voulais que ça ressemble à une de mes influences : le groupe Queen. L’intro est « Freddy Mercurienne« , j’ai l’impression. Pour le morceau « No More », on a samplé un américain qui s’appelle Jamison Ross qui est un batteur-chanteur. Pour « Numéro Vert », j’ai appelé deux violoncellistes. Pour « Juste pour nous », j’avais envie d’un côté un peu funky, un peu Motown. Pour « G/Bounce », j’avais besoin des influences de la côte ouest. On est entre Compton et Crenshaw, puis, à un moment, on se retrouve à Atlanta pour la partie « Bounce ».  » C’est un travail qui se fait évidemment en symbiose avec Kedyi, son binôme à la réalisation musicale, ainsi que les différents compositeurs convoqués sur cet opus.

Cette spontanéité se poursuit également dans la cabine d’enregistrement. Pour être le plus authentique possible, Tuerie ne couche rien sur papier. « Je rentre en cabine sans mon téléphone parce que je veux que toutes les émotions, que les flows et que les paroles soient spontanées. Du coup, je n’ai rien écrit pour ce projet à part le morceau « Là où on dort heureux » parce que ça me demandait trop de force. C’est un morceau que j’ai écrit littéralement en pleurant. J’avais donc besoin de l’écrire sur papier », confie-t-il. Avec Papillon Monarque, l’artiste voulait amener un zeste de nuances au Tuerie que le public a découvert à travers Bleu Gospel. « J’ai eu besoin d’exposer mes imperfections, faire comprendre que je suis vraiment loin d’être parfait. Je trouvais ça illégitime de me balader dans un costume du gars juste attendrissant, du gendre parfait. Il a fallu que je me montre sous d’autres coutures. »

L’image du papillon monarque représente donc le fait d’être en phase avec soi-même. Les nombreuses veines noires qui se dessinent sur les ailes du papillon symbolisent en réalité différents traits de caractère. « On m’a dit dans mes relations amoureuses que c’était facile de tomber amoureuse de moi, mais que le plus dur, c’était de rester parce qu’il y a beaucoup de névroses, beaucoup de complexité. J’avais besoin justement que les gens comprennent ce qu’on ne voit pas. Qu’est-ce qui est aussi complexe. » C’est donc à cœur ouvert que Tuerie laisse entrevoir la place que son ego peut prendre dans « Handicap Match », son côté peut-être un rien volage sur le morceau « Federico » ou encore, dans « Numéro Vert », son besoin d’introspection et cette tendance à se laisser emporter par les incertitudes et les mille questions qui les accompagnent.

Outre le fait de symboliser la métamorphose personnelle, une autre histoire se cache derrière l’image du papillon monarque : « En Amérique du Sud, quand tu en aperçois un lors de la fête des morts, ça veut dire qu’une personne aimée et regrettée pense à toi. C’est lié à la perte de ma grand-mère et d’une tante qui était totalement pilier. Du coup, un des climax de ce projet, c’est le morceau « Là où on dort heureux » qui est très important, car ça représente ce papillon monarque. » Pour s’assurer que le public assimile au mieux la vision qu’il avait pour Papillon Monarque, Tuerie s’est associé au réalisateur Steven Norel pour offrir un court-métrage éponyme en guise de première lecture visuelle.

Depuis la sortie du court-métrage et de l’album Papillon Monarque, tout s’est enchaîné pour le rappeur. Entre les premières parties au Zenith de son acolyte de toujours, Luidji, d’autres dates à droite à gauche qui se préparent, entre tournées et festivals, celui qui confie que le studio est l’endroit où il est le plus à l’aise avoue à demi-mot qu’il passe énormément de temps en studio ces derniers temps. Si cela présage plusieurs surprises dans les mois à venir, il ne reste plus qu’à espérer qu’une toute aussi belle surprise s’opère en ce qui concerne d’éventuelles dates belges. Et visiblement, nous ne sommes pas les seuls à nous en réjouir : « Vous n’avez rien à envier aux Américains ! Au niveau de l’ambiance, au niveau de l’entertainement, c’est un public hyper chaud, alors c’est mon rêve de performer chez vous. »

Par Laurenne Makubikua

Pour rtbf.be

05 juin 2023 à 16:24

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